Mal traitées au fil du temps, les petites rivières urbaines sont souvent enterrées, busées, rectifiées et ont fini par être oubliées, car assimilées à un égout ou un fossé. Avalées par l’extension urbaine et associées à une image négative du fait de leur artificialisation, elles constituent également une des dimensions de l’eau en ville les moins étudiées. Les analyses hydrologiques ont depuis longtemps démontrées qu’elles souffrent de l’Urban stream syndrome lié à l’augmentation des zones imperméables, des réseaux de drainage et à la canalisation. L’accroissement du ruissellement entraîne une amplification et une accélération des inondations aggravant la vulnérabilité des populations riveraines. Il provoque aussi l’incision et l’élargissement des lits mineurs, menaçant l’équilibre du système fluvial et la sécurité d’infrastructures (ponts, berges aménagées) et de terrains riverains. Les petites rivières urbaines sont également soumises à une diminution des débits estivaux voire des assecs. Elles se distinguent enfin par une dégradation généralisée de la qualité de l’eau) et des habitats et donc de la biodiversité aquatique. Souvent classées comme des masses d’eau fortement modifiées, elles sont considérées à l’échelle mondiale comme « our least restorable ecosystems ».
Pourtant, les petites rivières urbaines constituent l’une des rares infrastructures naturelles encore disponibles en ville pour fournir des services écosystémiques. Depuis une quinzaine d’années, elles redeviennent des enjeux du projet urbain. Reconstituer la trajectoire de ces environnements permet de reconstituer l’évolution de la relation à la rivière alors qu’ils sont caractérisés par un renouvellement des populations riveraines limitant la transmission de la mémoire des lieux (risque d’inondation, patrimoine, attachement). Cette dimension permet de compenser le concept d’amnésie environnementale générationnelle et contribue à faire de la rivière un commun au-delà des propriétaires riverains pour favoriser l’émergence d’un attachement à cette nature urbaine et développer une culture de la rivière. Face à l’urgence écologique, les travaux conduits en particulier au sein du groupe Paristreams dans le cadre de la phase 8 du PIREN-Seine ont pour objectif de « rendre visible ce que les autres ne savent plus voir, faire sentir ce à quoi ils ne sont plus sensibles », des macroinvertébrés aux crues, du patrimoine hydraulique à la végétation rivulaire, afin de réenchanter la gestion des petites rivières urbaines pour promouvoir une transition socio-environnementale durable.
Article de The Conversation : https://theconversation.com/et-si-on-rendait-leur-place-aux-petits-cours-deau-urbains-et-peri-urbains-192551
https://piren-seine.fr/piren_seine/phase_8_du_programme
Pour en savoir plus :
de Milleville, L. D., Gob, F., Tales, É., & Lespez, L. (2021). Altération hydrogéomorphologique et qualité écologique de trois petites rivières périurbaines de la métropole parisienne. Géomorphologie: relief, processus, environnement, 27(3), 205-219. https://journals.openedition.org/geomorphologie/15739
de Milleville, L., Lespez, L., Gauthier, A., Gob, F., Virmoux, C., Saulnier-Copard, S., … & Tales, E. (2023). Three thousand years of anthropogenic impact and water management and its impact on the hydro-ecosystem of the Mérantaise river, Paris conurbation (France). Quaternary Science Reviews, 307, 108066. https://doi.org/10.1016/j.quascirev.2023.108066
de Milleville, L., Gob, F., Thommeret, N., Lespez, L., Tales, É., Zahm, A., & Girondin, M. (2023). The heterogeneity of the hydromorphological responses of a stream to the urbanization of its basin. Earth Surface Processes and Landforms, 48(4), 735-755. https://doi.org/10.1002/esp.5514
Lespez, L., Arnoux, M., Carré, C., Germaine, M. A., Gob, F., & Tales, E. (2022, January). Consider suburban streams as hybrids: Methodological reflexion from the PARISTREAMs project. In Second International Conference «Water, Megacities and Global Change». https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000380319