Les chercheurs du programme DIGUES se posent la question suivante : quelles transitions sont possibles pour les systèmes d'endiguement maritimes et fluviaux en France, au 21e siècle, alors que les enjeux qui les concernent sont extrêmement variés et relèvent prioritairement de la protection des hommes et des biens, mais aussi - et de plus en plus - des usages, du paysage et de la nature ? Cette question est d'autant plus importante que les digues s'étendent sur un linéaire d'environ 9000 km en France.
L'élaboration d'un tel questionnement est liée à un contexte particulier, tant social que scientifique. Le 1er élément de contexte est que de nombreux acteurs locaux sont aujourd'hui à la recherche d'idées et de scénarios de transition de leurs digues à la fois du fait du changement climatique déjà à l'œuvre mais aussi parce qu'une nouvelle compétence leur incombe désormais : la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI). Nous sommes également partis d'un 2nd constat : il existe de nos jours des réticences sociales face à certaines formes plus innovantes ou radicales de défense douce contre les eaux, à savoir l'abaissement ou la réouverture des digues. Sur ce plan, nous faisons l'hypothèse que nous pourrons répondre à certaines de ces réticences en construisant des scénarios de transition s'appuyant sur la totalité des enjeux en présence, mais aussi sur la totalité des orientations possibles des systèmes d'endiguement (schématisées ci-dessous). Plus généralement, les solutions traditionnelles ayant montré leurs limites, aux plans financier, social, environnemental ou paysager, nous en sommes arrivés à l'idée que les paradigmes de gestion des systèmes d'endiguement étaient à penser autrement, c'est-à-dire, dans un premier temps, indépendamment de la technique. Certes la protection des populations contre les eaux reste un enjeu essentiel, mais d'autres enjeux nous semblent tout aussi pertinents et à prendre en considération dans la société contemporaine : à savoir les usages, le paysage et la nature, à la fois sur les digues et dans leurs environs proches. De cet axiome découlent deux hypothèses, que nous étudierons plus particulièrement : d'une part qu'il serait envisageable de mettre plus en avant le rôle de la végétation sur les digues ou au-devant des digues - rôle qui peut s'avérer tant paysager que défensif et qui n'a pas été très étudié en France -, d'autre part, que valoriser la nature patrimoniale et esthétique de certaines digues aiderait sans doute à surmonter des réticences sociales au regard de certaines solutions innovantes.
Ainsi, les apports du projet DIGUES seront de trois ordres. De façon générale, nous aiderons les territoires à passer d'une vision très techniciste des digues à une vision plus large, mieux intégrée et mieux ancrée dans le développement durable. Nous parviendrons aussi à caractériser les trajectoires possibles des systèmes d'endiguement dans des contextes physiques différents, ms aussi des contextes politiques, économiques et sociaux spécifiques. Nous évaluerons également l'acceptabilité des orientations imaginées et déterminerons leurs conditions de faisabilité dans chaque territoire. Enfin, au-delà de scénarios construits pour des sites précis (les 7 sites d'étude du programme), nous nous efforcerons de généraliser les conditions dans lesquelles des scénarios-types pourraient être reproduits.
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